Un stade de football, vide avec seulement un ballon au centre.

Ces dernières années, les questions écologiques prennent une place croissante dans le football. (Crédit : Pixabay)

« Le monde du football a pris conscience de l’urgence écologique »

Grégoire Sorin travaille à la Fédération Française de Football depuis 20 ans. Très concerné par l’écologie, il fait partie de ceux qui essayent de rendre le football plus éco-responsable.

Le football et l’écologie peuvent-ils faire bon ménage ? Pour Grégoire Sorin, ancien sélectionneur des U23 féminine de l’Équipe de France, maintenant conseiller technique régional à la Fédération Française de Football, c’est possible. Que ce soit par son engagement dans l’association Football Ecologie France ou encore dans son rôle d’éducateur auprès des jeunes, le Nantais essaye de conjuguer son travail dans le football avec ses préoccupations pour l’environnement. Au micro d’Horizon Médiatique, il donne son avis sur l’évolution de la place du football dans les enjeux écologiques, sur ce qui est mis en place, mais aussi sur ce qu’il reste à faire.

Le monde du football peut-il vraiment être écologique ?

« Il commence à essayer en tout cas. S’engager pour l’écologie, c’est une chose qui me paraît essentielle. Bien évidemment, le football est prétexte à agir, mais ça pourrait très bien être dans une autre discipline, ça marcherait autant. La différence, c’est que le football est la discipline phare en France. Un effort écologique impacte deux millions de licencié.e.s. La FFF (Fédération Française de Football, NDLR) a pris conscience de cela, elle ne peut pas se permettre de ne pas être acteur dans le domaine écologique. »

Justement, de par sa position de sport populaire, le football n’a-t-il pas le devoir de montrer l’exemple ? 

« Si, il se doit de le faire. Si une majorité de clubs de football s’engage dans une démarche écologique, cela peut faire la différence tout en donnant l’exemple pour d’autres sports. La Fédération travaille beaucoup sur le sujet. Dans son programme éducatif, qui est en place dans tous les clubs amateurs et professionnels de France, une partie est consacrée à l’écologie. Depuis plusieurs années, des aides sont en place pour les clubs amateurs. Par exemple, des minibus sont mis à disposition des équipes pour éviter de faire les déplacements avec quatre ou cinq voitures. »

Ne faut-il pas aussi accentuer les efforts des clubs professionnels, qui polluent plus que les amateurs ? 

« Bien sûr que si. Mais je pense qu’il faut faire la distinction entre football amateur et football professionnel, les enjeux sont différents. Quand vous allez jouer une compétition à l’autre bout du monde, il y a forcément un impact écologique. Il y a des logiques contre lesquelles on aura du mal à lutter. Quand tu es le PSG (Paris Saint-Germain, NDLR), et que tu dois traverser l’Europe pour un match, tu ne peux pas prendre le train. C’est incompatible avec le besoin de récupération et l’enchaînement des matchs. Mais les professionnels essayent quand même de s’adapter. »

Cela fait 20 ans que vous travaillez dans le football professionnel, j’imagine que vous avez vu arriver cette prise de conscience écologique dans le milieu ? 

« Complètement. Au début, on ne parlait pas d’écologie. Maintenant, ça a changé parce que tout le monde se rend compte du réchauffement climatique, et de ce que ça entraîne. Le monde du football a pris conscience de l’urgence écologique et fait des efforts. Par exemple, les équipes de France font les trajets de moins de 3h en train, ce qui n’était pas le cas avant. Dans un autre registre, le nouveau centre d’entraînement construit par le PSG a lui aussi été pensé pour être le plus respectueux possible de l’environnement. L’objectif étant que les bâtiments aient un bilan carbone quasiment nul. »

De l’extérieur, certaines de ces initiatives ressemblent surtout à du greenwashing…

« Évidemment, ça en est aussi. Et il ne faut pas se voiler la face, il y a également des enjeux économiques. Baisser sa consommation d’énergies, signifie optimiser l’argent dépensé. Mais ça peut aussi être un cercle vertueux. Il peut y avoir des effets concurrentiels entre les clubs. Si certains font des efforts, peut-être que d’autres vont vouloir faire de même. Cet esprit peut entraîner des actions ponctuelles et d’autres qui vont durer dans le temps. »

Que faut-il faire pour continuer à rendre le football plus « vert » ?

« Il faut continuer la mise en place d’actions comme le voyage en train, les terrains synthétiques en matériaux recyclés, etc. Les choses sont en train de changer. Par exemple, pour l’Euro 2024 en Allemagne, les matchs ont été répartis en zones géographiques pour que les équipes se déplacent quasiment exclusivement en train. Les démarches sont enclenchées, maintenant, il faut les réaliser. Et plus globalement, il faut surtout que ce combat écologique rentre dans les mœurs. Parce que pour l’instant, ce sont des actions qui sont ponctuelles et isolées. C’est une stratégie des petits pas, mais je pense que chaque action en entraînera d’autres. »

À titre personnel, vous avez décidé de vous engager dans l’association Football Écologie France…

« Oui parce que le sujet me tient à cœur. J’ai ainsi pu mettre en relation la fédération avec l’association Football Écologie France, pour qu’elles puissent mener des actions communes. Et comme je travaille dans la formation des jeunes, cela me permet de les former aux comportements éco-responsables. On leur apprend des choses simples mais nécessaires. L’idée étant que plus on impacte tôt les comportements, plus ça a le temps de cheminer pour que ces gestes soient intégrés et qu’ils se développent. »

Est-ce que vous sentez que cette nouvelle génération est plus sensible à la question écologique ?

« Oui, elle est plus sensible, mais ce n’est pas le tout de le remarquer, il faut aussi les accompagner. Les sensibiliser à l’écologie fait partie de l’éducation du futur sportif, au même titre que savoir quoi manger ou comment bien récupérer. Certains seront les professionnels de demain, alors il ne faut pas qu’ils soient isolés de ce qui se passe à l’extérieur. Au-delà du sportif, on doit les éduquer aux enjeux du monde actuel. »

Romain Zanol

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.