Jeune mineur réfugié devant les tentes du campement de fortune du square Sainte-Marie-Perrin de Lyon.

Le campement de mineurs non accompagnés du square Sainte-Marie-Perrin. © Thibaut Combe

À Lyon, le quotidien difficile des mineurs non accompagnés

Au square Sainte-Marie-Perrin à Lyon, les mineurs isolés étrangers sont nombreux à avoir été remis à la rue après la contestation de leur minorité. Depuis des mois, ils se battent chaque jour avec l’aide d’associations pour faire valoir leurs droits malgré des conditions de vie éprouvantes.

Derrière le terme de mineurs non accompagnés se cachent des individus isolés et sans ressources qui ont fui leur pays dans l’espoir de trouver un meilleur cadre de vie dans le nôtre. « On est venus en France en pensant qu’on allait nous mettre à l’abri mais c’est l’inverse », confie Aboubacar Sidiki Camara, l’un des mineurs non accompagnés du camp Sainte-Marie-Perrin. Selon le Collectif Soutien Migrants Croix Rousse, ils sont environ 150 à vivre dans ce square du 3e arrondissement de Lyon. Tous en procédure de recours suite à la remise en question de leur minorité, ces jeunes sont livrés à eux-mêmes en attendant de passer devant le juge des enfants. Poussés sur les chemins de l’exil, ils espéraient pourtant trouver en France une protection et des opportunités après une traversée migratoire souvent semée d’embûches.

Des abris de fortune comme lieu de vie

Installé depuis avril 2023, le campement a accueilli déjà plus de 300 d’entre eux. Il se compose d’une cinquantaine de tentes de camping bon marché plantées à des palettes, avec pour espace de vie commun des tables et des chaises en plastique et dépareillées. Les poubelles du square débordent et le sol, couvert de boue, atteste des récentes pluies. Les véhicules qui traversent continuellement la rue Garibaldi adjacente, génèrent un bruit de fond perpétuel.

Aboubacar, jeune Guinéen de 15 ans arrivé sur le territoire il y a cinq mois, s’est d’abord rendu dans un commissariat pour se faire recenser dans les fichiers. Là-bas, il a été redirigé vers le Forum réfugiés et enregistré pour procéder à une évaluation de son âge, les mineurs n’ayant pas les mêmes droits et aides que les personnes majeures. Dans l’attente de réponse, il a passé un mois dans un hôtel. Sa minorité contestée, il s’est retrouvé à la rue, sans aide. Mais Aboubacar, qui se dit « patient », a déposé un recours et espère que sa minorité sera enfin reconnue. À l’approche de l’hiver, il s’inquiète pour sa santé : « Le plus dur, c’est dormir ici avec la pluie et le froid. On n’a pas assez de nourriture et de vêtements. » Des larmes perlent sur son visage.

Pour le jeune homme, un sentiment d’insécurité règne dans le camp. Des migrants majeurs y ont également trouvé refuge et des « soûlards » viennent parfois semer le trouble. Il éprouve de l’injustice car « en cas de problème, on est tous sur un pied d’égalité alors que nous ne sommes pas tous dans la même situation ».

Entraide et espoir d’un avenir meilleur

Malgré les conditions de vie difficiles, Aboubacar fait part de ses perspectives d’avenir. Chaque jour, il suit des cours de français grâce au Secours Populaire. Il raconte que ça le réconforte « de voir autre chose que le camp ». Il a déjà une idée de ce qu’il veut faire « après » : se former à un métier et travailler. Alseny Sylla, qui lui est arrivé par la frontière italienne il y a quatre mois, aimerait commencer une formation d’électricien.

Les deux jeunes migrants s’entraident pour les « devoirs » et « partagent leurs idées ». « On a quitté chez nous, on a vécu des choses difficiles. Pour y arriver, on va se battre et s’encourager pour ne pas abandonner », raconte Alseny, les mains dans les poches pour se protéger du froid, en regardant son ami Aboubacar. 

Le soir, des riverains leur apportent quelques provisions alimentaires. Il n’y en a pas pour tout le monde. Vers 21 heures, un attroupement se crée autour d’un couple venu avec un carton rempli de paquets de chips individuels, très rapidement vidé par les jeunes. Ils rient et se chamaillent en se servant mais tous sont habités par la faim. Pour certains, ce sera le seul repas de la journée.

Plusieurs collectifs et associations qui se consacrent à la distribution alimentaire leur viennent en aide au quotidien. Le collectif Accueil des Mineurs Isolés Étrangers (AMIE) les accompagne dans la reconnaissance de leurs droits et leur fournit un appui juridique. Pourtant situé à un endroit stratégique, au pied du bâtiment de la Métropole de Lyon, ce camp de fortune ne semble pas faire réagir les autorités : « La mairie de l’arrondissement leur a fourni des toilettes de chantier mais c’est tout. Pour se doucher, ils doivent se déplacer jusqu’au Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) à Gerland », explique Zoé, membre du Collectif Soutien Migrants Croix Rousse.

Émilie Betbeder

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.