Loi mobilité : comment s’adapter quand la voiture est un outil de travail ?

Cet article a été publié dans le cadre d’une journée de simulation de rédaction web. Il a été validé, relu et corrigé par les élèves, en totale autonomie.

La Commission européenne souhaite mettre en place l’obligation pour les entreprises de passer au tout électrique dès 2030. Déjà contraintes par la loi mobilités depuis un moment, les entreprises doivent se plier à ces nouvelles règles, une transition parfois compliquée.

Bête noire de l’environnement pour certains, objet de passion pour d’autres, l’automobile se trouve dans une position ambivalente ces dernières années. Dans le monde professionnel, elle reste toutefois un outil indispensable en matière de déplacement.

Ces derniers mois, la fin de la vente des véhicules thermiques neufs a été fixée à 2035. En 2019, la loi mobilités, dite LOM, est promulguée. L’un des points de la loi concerne tout particulièrement les entreprises. Elle consiste à obliger celles qui possèdent plus de 100 voitures à changer leur flotte pour des véhicules plus propres, ou à faibles émissions (VFE). Pour être considéré comme propre, les véhicules doivent être soit électriques à 100 %, soit hybride rechargeable (PHEV).

En 2022, 10 % du renouvellement de la flotte des entreprises concernées devait être composé de ces VFE. Ce pourcentage passera à 20 % en 2024, et ne cessera d’augmenter d’année en année jusqu’à 2035. Toutefois, la Commission européenne souhaite proposer une réglementation qui imposerait une obligation d’achat de véhicule 100 % électrique, et ce, dès 2030. Dès maintenant, les entreprises doivent donc adapter leur façon d’acheter.

Une transition compliquée pour les entreprises

Cette transition n’est pas simple pour les entreprises. En Alsace, l’entreprise Piscines Waterair peine à faire évoluer son parc automobile. Plus de 100 des 300 employés disposent d’un véhicule de fonction. L’utilisation des véhicules pour cette entreprise est principalement commerciale. Les employés couvrent de grandes distances pour se rendre au domicile des clients. Ainsi, les kilomètres parcourus sont importants.

Pour le moment, notre parc ne comporte aucun véhicule électrique, car nous ne pouvons l’envisager

Céline Trallero, responsable de la flotte chez Piscines Waterair

Le problème majeur est l’autonomie. Les petites citadines électriques présentes sur le marché ne proposent pas une autonomie suffisante à l’utilisation professionnelle. Par exemple, une e-208, le dernier petit modèle de Peugeot, n’offre que 360 kilomètres d’autonomie. Il faut également prendre en compte que la distance annoncée n’est pas forcément la distance réelle : sur l’autoroute, la consommation d’électricité est plus conséquente.

Avec une distance de 100 kilomètres par jour en moyenne pour les employés, l’électrique devient une contrainte. Pour les acheteurs, c’est un réel casse-tête, en plus de la question du prix, il faut que les voitures n’empêchent pas les salariés d’effectuer leur travail comme avant : la recharge électrique est très contraignante.

Côté vendeur, l’espoir est de mise

Même si elle semble se faire pas à pas, les entreprises savent que 2035 approche et que la transition est inévitable. En face, les constructeurs et les loueurs doivent eux aussi s’adapter à cette évolution. En dépit de la contrainte que représente la loi mobilité, les entreprises de locations longues durées (LLD) proposent des aides et des solutions. Yoann Menard, consultant pour la société ALD, montre que l’entreprise sait évoluer avec la transition. « Nous sommes conscients que toutes les entreprises ont des besoins différents, c’est pourquoi nous proposons des véhicules en fonctions de ces besoins ». Nombre de trajets, type de trajet (autoroute, ville) : ces points sont les facteurs à prendre en compte lors des conseils aux clients. C’est aussi ce qui peut freiner la transition.

Chez ALD, 33 % des véhicules commandés sont des véhicules à faibles émissions (PHEV ou électrique). Et parmi eux, seulement 10% sont électriques. Ces chiffres montrent que les entreprises restent réticentes au passage à l’électrique. Pour Yoann, cette bête noire que représente la loi mobilité n’est pas si effrayante que ça.

L’électrique fait peur pour l’instant, mais c’est le cas de toutes les avancées technologiques. Il y aura un temps d’adaptation, mais ce sera de plus en plus facile.

Yoann Menard, consultant pour la société ALD.

Les PHEV, la solution pour une transition en douceur ?

Les PHEV sont des voitures hybrides rechargeables. Cette motorisation verte est une combinaison d’un moteur électrique et d’un moteur thermique. L’un prend le relais sur l’autre, ce qui permet une plus longue autonomie qu’un véhicule seulement électrique.

Chez Piscines Waterair, les commerciaux font au minimum 3 000 kilomètres par mois. De plus, les trajets des employés empruntent principalement l’autoroute. Ces critères font de la voiture électrique une mauvaise prétendante pour la flotte de l’entreprise. Céline Trallero, chargée de l’achat de ces véhicules, se rabat alors sur les fameux PHEV. Cependant, cette solution miracle a un coût : l’entreprise Waterair a commandé cette année sept véhicules supplémentaires, tous hybrides rechargeables. Le premier problème est le manque de choix.

Lorsque l’on cherche un véhicule hybride, il n’existe pas d’équivalent aux citadines que nous utilisons habituellement.

Céline Trallero, responsable de la flotte chez Piscines Waterair

Les commerciaux roulent majoritairement en Peugeot 208 ou en Citroën C3. Ces modèles n’existent pas en hybride, mais uniquement en électrique. « On se retrouve alors forcés de passer dans la gamme au-dessus, on achète des petits SUV, mais ils sont forcément plus chers ». Au total, l’acheteuse a dû signer pour 70 000 € de plus que le budget habituel. Les motorisations propres sont plus chères à la base, mais ce souci de choix fait encore un peu plus gonfler la cagnotte. Sans compter que les PHEV disposent d’un bonus écologique moindre par rapport aux véhicules électriques. Pour une entreprise comme Piscine Waterair, l’impact est important mais reste envisageable. Pour une plus petite entreprise, l’écart serait trop grand.

Finalement, la transition des flottes des entreprises à l’électrique se fait peu à peu, mais l’engrenage semble rouillé pour le moment. Différents facteurs empêchent encore les professionnels de se lancer dans le grand bain de l’automobile propre.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.