Cortège de la manifestation du 25 novembre à Paris Crédits Picasa

Féminisme : une lutte au-delà du 8 mars

Cet article a été publié dans le cadre d’une journée de simulation de rédaction web. Il a été validé, relu et corrigé par les élèves, en totale autonomie.

De Paris à Lyon, la vague féministe déferle chaque année dans les rues. Réseaux sociaux, grèves et manifestations, les actions féministes évoluent et prennent de plus en plus d’ampleur.

Onze féminicides en mars : un lourd bilan qui sonne comme une habitude. Dimanche 2 avril, un rassemblement était organisé à Ronquerolles (95) pour rendre hommage à Mathilda, 33ᵉ féminicide de l’année. Face à l’horreur, les mobilisations contre toutes les violences faites aux femmes n’ont de cesse d’augmenter et de se diversifier.

Nora, 24 ans, manifestante lyonnaise, confirme : “Les luttes, ça fait un paquet de décennies qu’elles sont en marche. C’est juste qu’avec l’avènement des réseaux sociaux et d’internet, elles sont beaucoup plus audibles. On est sur une constante. L’évolution des différents canaux de communication a fait qu’il y a plus de gens qui se sont greffés à ces luttes“.

Marie, 30 ans, nuance néanmoins ces propos. Au début de son engagement militant, il y a dix ans, les manifestations étaient moins régulières à Lyon. “#MeToo n’existait pas encore. C’est un sujet qu’on abordait peu. Il y avait juste la journée internationale des droits des femmes le 8 mars. Maintenant, on en parle de manière plus générale, affirmée et libérée“.

Des revendications intersectionnelles

Fanny, 25 ans, étudiante lyonnaise, résume la situation : “Il y a une évolution et dans le bon sens, puisqu’il y a eu quand même #MeToo, puis Balance ton porc, qui se sont déclinés d’une multitude de manières, avec pleins de Hashtags différents“.

Dans le cortège parisien, Sonia, membre du collectif Les dionysiennes (nom des habitantes de Saint-Denis) nous raconte la dure histoire du lancement du #Balancetoncomico. “Une habitante de Seine-Saint-Denis, Leila, est allée porter plainte au commissariat, sa plainte n’a pas été reçue et son mari l’a tuée le lendemain, elle était enceinte”. C’est à la suite de ce drame que le collectif s’est formé et que ce hashtag a envahi les réseaux sociaux.

Le collectif Les dionysiennes le 19 novembre à Paris – Crédits Matéo Bonin

Le deuil dans la lutte apporte une force incommensurable mais on ne s’y habitue jamais”. Après des mois d’actions, Les dionysiennes ont obtenu des formations pour les policiers.

Perturber pour exister

Face au silence et aux réponses insuffisantes, trouver des nouveaux moyens de s’exprimer devient nécessaire. Pour Judith, 23 ans : ” On met la pression même si ce n’est pas évident. On se fait entendre, pas forcément écouter mais au moins on fout le bordel, on fait parler de nous“.

Pour sortir des actions militantes habituelles, Pauline Rapilly Ferniot, élue écologiste de Boulogne-Billancourt et membre du collectif Ibiza, juge que “la joie dans la lutte est nécessaire et crée des résultats surprenants“.

Ce collectif menait en septembre dernier une action contre Gérald Darmanin et ses accusations d’agressions sexuelles. En se faisant passer pour un groupe de supporters fanatiques du ministre de l’Intérieur, le collectif Ibiza scandait les pires phrases et inculpations du ministre.

Pancarte manifestation du 26 novembre à Lyon – Crédits Zoé Thomas

Pauline Rapilly Ferniot estime qu’ “utiliser tout notre dégoût et notre haine de ces gens-là en joie, c’est très déstabilisant pour eux, en plus d’apporter une plus grande visibilité à la cause”.

“Pour toutes nos mamans oubliées”

Aicha, membre de l’association francilienne MaMaMa, a décidé de se rendre utile en “soutenant les vivantes“. L’organisation, née pendant le Covid pour soutenir les mères seules, délivre des paniers de produits de première nécessité aux femmes et enfants de toute la région parisienne. Une distribution inédite car “les paniers sont personnalisés et sans limites”. “Des gens font plus de deux heures de transports pour les recevoir”, affirme Lysa, une militante féministe de Saint-Denis.

L’association Mamama lors de la manifestation du 19 novembre à Paris – Crédits Association MaMaMa

Elle admire toutes ces actions qui montrent que “nos quartiers ne sont pas des déserts féministes”. Elle rappelle aussi l’importance des temps d’écoute : “De nombreuses actions avec des lycéennes sont menées où chacune raconte son viol pendant 20 minutes, ce sont des moments très forts”.

Le besoin d’une grève généralisée

Toutes ces mobilisations sont complémentaires et dressent le portrait d’un mouvement féministe qui ne s’arrête jamais. Les violences sexuelles et de genre sont là toute l’année, les féministes doivent l’être aussi, par tous les moyens et notamment par la grève féministe.

Ce mode d’action, vieux comme le monde, est trop rarement utilisé par le mouvement, surtout en France. Alors que, par exemple, le 8 mars 2019, 4 millions d’Espagnoles se mettaient en grève pour la journée internationale des droits des femmes.

Elodie, membre de Nous Toutes Paris, déplore ce blocage dans l’hexagone : “On est 51 % de la société avec un problème commun, on devrait pouvoir s’organiser et faire raz de marée, au moins sur des journées importantes comme celle-ci”. Mais cette année, en parallèle de la mobilisation contre la réforme des retraites, une journée de grève féministe a enfin été déclarée par les féministes.

Cette grève doit être alors reconductible pour les féministes afin que la lutte ne se limite pas à manifester une fois par an.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.