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RailCoop, une coopérative à grande vitesse

Première coopérative ferroviaire de France, RailCoop vient d’atteindre un capital social d’1,5 millions d’euros. Décryptage d’une initiative citoyenne sur les rails de la réussite.  

RailCoop est le premier opérateur ferroviaire à fonctionner en coopérative. Son objectif ? Se re-approprier des lignes rurales souvent mises à l’abandon tout reposant sur un fonctionnement citoyen et durable.   

Après 80 années de monopole sur le trafic ferroviaire français, la SNCF ouvre ses rails à la concurrence. Pour voyager, plus besoin de passer par la célèbre société de train française et son mythique jingle. Cette  directive avait été lancée par la Commission européenne en 1990 pour libéraliser le marché ferroviaire française : la SNCF restera publique, mais les entreprises privées pourront aussi utiliser les rails de l’hexagone, comme c’est déjà le cas chez nos voisins européens. Une opportunité qui n’a pas laissé certains citoyens de marbre.  

Avec plus de 7000 sociétaires, un capital social de plus d’1,5 millions d’euros, et le certificat obtenu auprès de l’ART (Autorité de régulation des transports) c’est un pari audacieux mais réussi pour la coopérative RailCoop qui pourra ouvrir son service de trains aux voyageurs. Elle espère la mise en place des lignes Bordeaux-Lyon, Toulouse-Rennes ou Lyon-Thionville pour 2022 et 2023. RailCoop ambitionne de faire rouler ces trains de passagers dès 2022 et des lignes fret (train de marchandises) dès 2021 sans subvention publique. La coopérative voit déjà loin en espérant ensuite une ouverture des services de grandes lignes internationales, de jour comme de nuit.  

RailCoop est né au début de l’année 2019, dans un de ces territoires ruraux du sud-ouest de la France où l’alternative à la mobilité individuelle est quasiment inexistante. Des citoyens décident alors de se mobiliser collectivement pour penser autrement la mobilité ferroviaire. “ L’ouverture à la concurrence nous amène à penser à un nouveau modèle ”, s’exprimait Alexandra Debezieux, directrice générale de RailCoop, au micro de Radio Parleur. 

Un modèle qui s’aligne sur le covoiturage 

Le train est le moyen de transport de grande distance le moins polluant et le plus durable. En effet, il émet  de 8 à 20 fois de moins de CO2 que la voiture. Face à l’urgence d’une transition énergique qu’il nous faut mettre en place pour pallier aux conséquences du réchauffement climatique, le train est la solution idéale.  

Autour de la capitale française, les rails des LGV (ligne à grande vitesse) se propagent, reliant différentes métropoles en un temps record. La France compte 2 800 km de LGV. 90 % des français habitent à moins de 10 km d’une gare. Pourtant, 30 % de ces gares ne sont pas desservies par les lignes à grande vitesse.  

RailCoop relève le défi : mieux desservir certains espaces ruraux en planifiant des trains au-delà des LGV ou des marchés de masse qui gravitent autour de la région parisienne pour désenclaver certaines zones rurales qui obligent l’utilisation quotidienne d’une voiture. Les premières lignes prévues (Bordeaux-Lyon, Lyon-Thionville et Toulouse Rennes) ne passeront pas par Paris. Une rentabilité examinée à la loupe par RailCoop. “ Le train est un marché de l’offre plutôt que de la demande ”, ajoute Alexandra Debezieux. La coopérative s’est alignée sur le tarif du covoiturage pour fonder tout son modèle économique.  

Source : Page Facebook Railcoop

Une entreprise solidaire d’utilité sociale 

L’ouverture à la concurrence de la SNCF ne laisse pas sans crainte les cheminots et leur statut de salariés. Le partage des rails se fait sur la base d’un train par rail. Une entreprise qui possède tous les rails a une meilleure maîtrise sur le trafic, et par conséquent, elle peut y rentabiliser au mieux le traffic.  

Penser un nouveau modèle, c’est aussi penser la gestion d’une entreprise autrement. En bonne initiative citoyenne, RailCoop a choisi de se baser sur le critère ESUS (entreprise solidaire d’utilité sociale), où la dizaine de salariés et les 5 membres du conseil d’administration sont partie prenante de l’entreprise. Ils s’engagent à prendre au sérieux les enjeux de traitement égalitaire femmes-hommes et les discriminations. Les rémunérations se font à l’échelle 1 à 7 : concrètement, entre la personne qui gagne le plus et la personne qui gagne le moins, le salaire ne peut pas être multiplié à plus de 7.  

De 32 sociétaires pionniers, ils sont maintenant plus de 7000 à avoir réuni un capital de plus d’1,5 million d’euros. Tout le monde peut devenir sociétaire, chaque part sociale coute 100€, et elles peuvent être cumulables. RailCoop s’est déclaré comme étant une société commerciale d’intérêt collectif (SA) : une personne égale une voix en assemblée générale et en cas de faillite de la coopérative, les sociétaires ne peuvent pas perdre plus que le capital investi. Un modèle qui, depuis 3 ans, n’a pas pâli. 

Du reste, la coopérative doit encore faire ses preuves par l’acquisition de matériel ferroviaire et de locomotives. RailCoop ambitionne de racheter du matériel ferroviaire d’occasion et de le restaurer. Le wagon de RailCoop semble sur la bonne voie !  

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.