Des lunettes qui n’ont pas fait le tour du monde !

Un écolo-opticien ? Sébastien Bétend conçoit des montures de lunettes éco-responsables, éthiques et fabriquées en France. Un pionner qui a imposé un certificat d’origine aux fabricants dès 2014.

Sébastien Bétend est le premier opticien français à avoir imposé des certificats aux fabricants pour attester l’origine de la fabrication des lunettes. Comme les labels spécifiques aux fruits et légumes, lors de l’achat de montures il est possible de voir une charte attestant de leur fabrication française et « cela n’avait jamais été fait dans la profession », affirme le Lyonnais. Pour les verres un certificat nominatif est également donné à chaque client.

Boutique labélisée « Lyon Ville Equitable et Durable »

« A la base je suis opticien », explique Sébastien Bétend, multi-diplômé en optique-lunetterie. C’est pourquoi, après 27 mois de recherche, il ouvre en avril 2012, « L’Optique par Sébastien Bétend » : première boutique d’optique éco-conçue de France, « située à Bron c’est toujours la seule en France ». Ce magasin est entièrement constitué avec des matériaux écologiques et fabriqués en France. Carrelage, radiateurs, mobiliers, produits d’entretien, haut-parleurs, papeterie, jusqu’à l’aquarium et aux péniches en bois pour mettre les dossiers, rien n’a été laissé au hasard. Ainsi, la boutique est labélisée « Lyon Ville Equitable et Durable ».

Mais, lorsqu’il a cherché des lunettes pour son magasin, les seules qui répondaient aux trois axes du développement durable étaient en bois et coutaient environ 300 euros. Alors, en 2014, Sébastien Bétend décide de créer sa propre collection de lunettes en matériaux écologiques mais à un prix plus abordable. Ses montures écologiques et fabriquées en France sont à partir de 159 euros. Elles s’appuient sur les trois axes du développement durable : l’axe écologique car les lunettes sont 100% recyclables et fabriquées à moins de 150 km de Lyon, l’axe économique, en fabricant en France. Et enfin, l’axe social, grâce aux soutiens des emplois français et aux reversions de contributions et dons à différentes associations comme la Fondation Terre Solidaire ou Médecins sans Frontières.

Des montures biodégradables

Depuis des années déjà, la matière phare des lunettes est l’acétate de cellulose. Conçue en 1865, ce polymère naturel est composé de cellulose extraite du coton, de la pulpe d’arbre, voire de déchets textiles. La matière est biodégradable mais elle est mélangée avec des solvants, parfois nocifs, comme l’acétone, l’acide acétique ou même le dioxane (fortement suspecté d’être cancérigène). Sébastien Bétend décide donc de se servir du bio-acétate, très peu utilisé par les lunetiers en 2014. Comme il l’explique : il s’agit d’un « dérivé de coton qui contient soit très peu de produits pétrolifères soit pas du tout selon les coloris, il est recyclable et biodégradable » et ses solvants sont naturels. Biodégradable oui, mais « pas sur le nez » comme aime le préciser l’opticien. Malgré les composés naturels, les montures tiennent dans le temps : certains portent encore la collection de 2014. Le bio-acétate est donc une version écologique et non-toxique de l’acétate de cellulose, fabriqué principalement en Italie et en Asie. Pour réduire la pollution due au transport, Sébastien Bétend choisi de travailler avec une production située dans le Nord de l’Italie. Tout le reste des lunettes, même les petites parties métalliques à l’intérieur des branches, est fabriqué dans le massif jurassien.

Les lunettes OpSB (pour Optique par Sébastien Bétend) sont disponibles actuellement chez environ 230 opticiens en France. Mais pour certains magasins d’optique, il est encore difficile de proposer la collection à leurs clients qui aiment beaucoup porter des marques. Alors depuis deux ans, Sébastien Bétend a cédé sa boutique pour se consacrer à sa collection de montures écologiques et faire du coaching en fabrication française et développement durable auprès d’opticiens désireux de suivre sa voie. Pour lui, il y a deux types d’opticiens qui achètent ses montures : « ceux qui font ça parce qu’ils sont convaincus eux-même » et ceux « qui le font pour le business, parce que le marché est porteur ».

Ce révolté s’énerve de l’opportunisme de certaines marques qui utilisent le greenwashing pour se donner une image de responsabilité écologique trompeuse. En France, la majorité des lunettes achetées ont été fabriquées en Asie. La fameuse « seconde paire à 1€ » de piètre qualité, est quasi systématiquement proposée car son coût est inclus dans celui de la première paire. L’industrie de la lunetterie avec 21,9 millions de paires de lunettes vendues en 2019 (selon une étude de YouGouv) engendre une surconsommation, un gaspillage d’eau et de la pollution due aux transports.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.