30 ans de Novaïa Gazeta : comment les autorités russes censurent les médias  

Cet article a été publié dans le cadre d’une journée de simulation de rédaction web. Il a été validé, relu et corrigé par les élèves, en totale autonomie.

Le 1er avril, Novaïa Gazeta a eu 30 ans. Ce média russe indépendant, qui inquiète le régime, subit les foudres des autorités. Elles lui ont dernièrement retiré son certificat d’enregistrement à la suite de la décision de la Cour de Moscou sur la réclamation de Roskomnadzor (RKN), régulateur des médias en Russie.

Novaïa Gazeta est un média russe indépendant fondé en 1993. Ce journal a beaucoup écrit, et continue à le faire, sur la corruption et les droits de l’homme. En 2017, le journal a publié des articles d’Elena Milashina racontant la persécution contre les homosexuels par les autorités tchétchènes. Des publications qui lui ont valu beaucoup de menaces.

Novaïa Gazeta, un journal libre

Depuis les années 2000, de nombreux journalistes de Novaïa Gazeta et des personnalités y étant affiliées ont été assassinés, ou, selon la version officielle, sont morts dans des circonstances inexpliquées. Parmi eux, nous pouvons citer Igor Domnikov, Iouri Chtchekotchikhine, Anna Politkovskaïa, Stanislav Markelov (avocat), Anastasia Babourova, Natalia Estemirova.

Dmitri Mouratov, le rédacteur en chef, a obtenu le prix Nobel de la paix en 2021. Après l’invasion russe de l’Ukraine, il décide de faire don de sa médaille à l’Unicef pour aider les réfugiés ukrainiens. C’est la maison de vente aux enchères américaine Heritage Auctions qui s’est chargée de la vente pour un montant de 103,5 millions de dollars.

L’enchère. Image: Elizaveta Kirpanova/ pour Novaïa Gazeta Europe

Une pression sans limites

Quand la guerre en Ukraine a commencé, la pression contre les médias indépendants a augmenté en Russie. Ils ont presque tous été fermés.

Novaïa Gazeta a essayé de se conformer à toutes les nouvelles lois, mais ça n’a pas aidé. Le 28 mars 2022, le média a suspendu toutes les opérations après le deuxième avertissement de régulateur de médias russes (Roskomnadzor, RKN).

L’équipe de Novaïa Gazeta après la suspension des opérations. Image: Irina Vorobyova

Après, le RKN a poursuivi en justice le processus de privation du certificat d’enregistrement de la version imprimée de la Novaïa Gazeta, du site et du magazine Novaïa rasskaz-gazeta (projet créé par les journalistes du Novaïa en Russie après la suspension des publications, NO).

En ce moment, les sites de Novaïa GazetaNovaïa rasskaz-gazeta et Svobodnoïe prostranstvo sont bloqués en Russie sans explication claire. Le RKN a expliqué les avoir censurés parce qu’ils ont été des sites ‘miroirs’ de NO. La porte-parole Nadezhda Prusenkova a infirmé cette thèse.

Les recours juridiques

Le 4 septembre 2022, la Cour du district de Basmanny à Moscou a donc invalidé le certificat d’enregistrement de Novaïa rasskaz-gazeta. Le régulateur des médias, le Roskomnadzor, a affirmé que le média avait été enregistré en 2009 alors que le premier numéro de la revue n’était sorti qu’en juillet 2022.

Pendant l’audience, les représentants du régulateur sont restés campés sur leur position. La Cour d’appel a déclaré : “Novaïa Gazeta n’a pas fait de publications pendant un an et Novaïa Gazeta n’a pas donné au Roskomnadzor la nouvelle version de sa charte”.

L’audience du 7 février 2023. L’image publiée par Novaïa Gazeta Europe

Un avenir incertain

Cependant, le journal continue son travail. Novaïa Gazeta publie chaque jour des articles malgré la censure.

Nadezhda Prusenkova. Image: Nadezhda Prusenkova/Facebook

Actuellement, nous travaillons seulement sur le site internet. Les réseaux sociaux et site internet sont mis à jour– a affirmé Nadezhda Prusenkova, la porte-parole de Novaïa.

Dans le même temps, nous avons déposé les documents pour l’enregistrement d’autre journal. Mais il est clair que personne ne l’enregistrera maintenant. Nous tentons de développer la chaîne sur YouTube et de chercher de nouvelles formes d’expression.

Novaïa Gazeta ne finit pas son travail seulement sous la décision de la cour.

Il y a une question importante : actuellement, y a-t-il du sens à déposer des appels contre les décisions des cours russes? La juriste, spécialiste des médias Galina Arapova croit que oui :

Galina Arapova. Image : Zelenysh Nelubin/Facebook

C’est nécessaire pour obtenir justice, même si nous ne faisons pas confiance au tribunal et comprenons que la cour ne sera probablement pas de notre côté. Puisque la justice n’a pas de délai de prescription, même si Novaïa Gazeta reçoit cette décision après un appel dans quelques années, ce sera un document juridique important auprès de la Cour européenne des Droits de l’Homme.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.