Ukraine : Les fêtes bouleversées par la guerre. Olena, réfugiée ukrainienne raconte.

Cet article a été publiée dans le cadre d’une journée de simulation de rédaction web. Il a été validé, relu et corrigé par les élèves, en totale autonomie.

C’est le premier Noël pour les réfugié.es ukrainien.nes depuis le début du conflit. En cette fin d’année où les familles se réunissent, celles ukrainiennes sont divisées par la guerre. Témoignage d’Olena Resenchuk.

Elle me dit bonjour en chantant. Olena Resenchuk, réfugiée ukrainienne en France, s’assoit, commande un cappuccino. Elle sourit à tel point qu’on a du mal à croire qu’elle a traversé l’Europe pour arriver ici. Fui la guerre comme des milliers de ses compatriotes. Elle me sourit et pourtant dans ses yeux des larmes perlent quand elle me raconte son récit.

Un Noël politique

Le café est bruyant, les familles autour de nous se retrouvent, l’atmosphère est joyeuse en cette fin d’année. Pour Olena, les fêtes ont eu un goût différent, celui amère de la guerre. Son mari est resté mobilisé en Ukraine. Cet ingénieur s’occupe maintenant de la logistique et de l’approvisionnement des armes pour sa patrie. Son fils aîné est retourné au pays à la fin de l’été, il veut se mobiliser dans l’armée. En attendant sa majorité, celui-ci termine son cursus d’études. Éloignée par la distance, la famille reste en lien grâce aux réseaux sociaux. De son côté, Olena a fêté Noël en France les 24 et 25 décembre « comme une catholique » avec ses deux derniers fils de 13 et 7 ans. « En Ukraine, on est essentiellement orthodoxes, on fête donc Noël du 6 au 7 janvier. Mais cette religion, elle nous vient de la Russie. Continuer à respecter cette tradition pendant la guerre c’est comme soutenir l’envahisseur russe. »

La guerre des langues

Comme d’autres ukrainien.nes, Olena bouscule ses traditions et habitudes pour montrer son opposition à la Russie. Pour autant, pour les ancien.es, il peut être compliqué de s’adapter à ces changements. Olena, fille d’un couple russe ayant migré en Ukraine, est la première à être née sur le sol du pays et à porter la nationalité ukrainienne. « La langue que l’on parle aussi est politique. Ma langue natale est le russe, j’ai ensuite appris l’ukrainien. Depuis le début de la guerre, je parle uniquement ukrainien, à part avec mes parents, ils ne comprennent pas ce choix et s’expriment seulement en russe. » Dans sa voix, on entend une pointe de regret, elle baisse la tête et ajoute : « Mon fils de 17 ans, lui, a décidé de parler uniquement ukrainien. Il ne parle plus avec ses grands-parents. » Si la maman comprend et soutient les engagements de son fils, elle regrette de voir les liens familiaux se dilater à cause du conflit.

Un futur dans les ruines

Quand Olena a appris le français à l’adolescence, elle était loin de se douter de devoir s’en resservir 20 ans plus tard, dans un tout autre contexte. Quasiment un an après le début du conflit et sa fuite vers l’Europe de l’Ouest, l’Ukrainienne est heureuse de sa venue en France. Accueillie au départ dans une famille française, elle a fini par trouver un appartement à Tarare, une ville à 40km de Lyon. Ici, elle s’épanouit, elle a trouvé un travail de surveillante au collège de la ville. Grâce à ce travail, elle peut venir en aide aux adolescent.es ukrainien.nes qui ont parfois quelques difficultés avec la langue française. À l’évocation d’un retour définitif en Ukraine celle-ci me répond :

« On sait maintenant qu’il nous faudra 20 à 30 ans pour reconstruire l’Ukraine et je ne souhaite pas faire grandir mes enfants dans un pays en ruine. »

Il faut dire que ses deux enfants, restés en France avec elle, semblent s’épanouir eux aussi. Du haut de ses 7 ans, son plus petit a quelques difficultés. « Disons que la langue française lui donne du fil à retordre » me dit Olena d’un ton rieur. Elle plisse les yeux avec un sourire et ne semble avoir qu’un seul regret : sur ses papiers d’identité Olena est devenu Elena. Un choix fait par souci d’intégration. Elle finit son cappuccino et le repose. « J’aime bien venir ici, c’est le seul endroit de la ville où l’on fait le cappuccino comme chez moi, en Ukraine ».

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.