Les animateur.ices en séjour adapté

Cet article a été publié dans le cadre d’une journée de simulation de rédaction web. Il a été validé, relu et corrigé par les élèves, en totale autonomie.

Pendant que la plupart des français réveillonnent en famille, les dix membres de l’équipe d’animation de l’Association pour adultes handicapés (APAH) Grand Est* passent les vacances de noël en séjour adapté. Cet article fait partie du dossier handicap.

« Vous allez probablement pleurer »

Nathalie, responsable du service loisirs et vacances

Dix jours hors du temps, dans les Vosges. « Vous allez probablement pleurer », dit Nathalie, la responsable du service loisirs et vacances de l’APAH Grand Est lors du premier des deux jours de formation. La mission des salariés : animer et accompagner les vacancier.es en situation de handicap. À son équipe, Marion, la directrice du séjour, transmet le « guide de l’animateur en séjour adapté ». Il mentionne : « Certain.es [vacancier.es] seront en situation de handicap mental voire psychique avec des difficultés à comprendre les interactions et/ou les normes sociales, des troubles relationnels ; d’autres de handicap physique avec l’impossibilité ou des difficultés à marcher, manger, se laver, aller aux toilettes, des troubles sensoriels ; parfois les deux ». En plus d’être une aide indispensable pour effectuer les gestes du quotidien, le défi des animateur.ices est de donner le sourire en créant des animations variées et en animant les sorties.

Les maitres-mots : entraide et communication 

« J’appréhende de travailler avec une nouvelle équipe »

Matéo, animateur

Il n’y a pas besoin d’avoir un diplôme particulier pour devenir animateur en séjour adapté, plutôt des qualités humaines, comme avoir du bon sens et savoir s’adapter. Plus de la moitié de l’équipe d’animation occupe déjà un poste dans le domaine du social le reste de l’année. Iels sont éducateur.rices spécialisé.es, assistant.es d’éducation, prof de sport, animateur.rices socio-culturel.les, ou travaillent comme animateur.ices en classe de découverte avec les enfants. D’autres sont artistes, routier.es, ou finissent leurs études. Pour sept des dix animateur.ices, c’est la première expérience en séjour adapté. « J’appréhende de travailler avec une nouvelle équipe », confie Matéo, qui travaille avec l’APAH depuis plusieurs années. C’était sans compter sur le climat de bienveillance qui s’est installé dès les premiers jours. Pour les premières toilettes, les « novices » ont pu compter sur la pédagogie des « expérimentés ». C’est l’idée d’une équipe unie plutôt que d’une somme d’individus. Côté animation, ça veut dire interagir pour rendre vivantes les activités proposées par les collègues, faire en sorte qu’elles fonctionnent en motivant les vacancier.es. Côté vie quotidienne, c’est finir sa mission puis se demander s’il y a besoin d’aide dans la pièce d’à côté. C’est garder son téléphone allumé et être disponible lorsqu’un collègue a besoin de quelque chose. C’est apprendre à passer le relais, et se soutenir psychologiquement. 

Donner de sa personne 

« J’ai posé mes vacances pour venir en séjour adapté, ce qui est sûr, c’est que je ne suis pas ici pour l’argent »

Luc, animateur

« Je tiens debout encore »

Sacha, animateur

Les postes des animateur.ices sont encadrés par le Contrat d’engagement éducatif, spécifique au domaine de l’animation. « J’ai posé mes vacances pour venir en séjour adapté, ce qui est sûr, c’est que je ne suis pas ici pour l’argent », explique Luc. Le salaire est de 38,11 € brut par jour. La journée commence à huit heures du matin. Il y a beaucoup de choses à apprendre et de réflexes à adopter pour assurer la sécurité des vacancier.es : gélifier l’eau pour éviter les fausses routes, utiliser un verticalisateur (qui permet de transférer les vacanciers qui n’ont pas l’usage de leurs jambes du lit au fauteuil par exemple), changer les protections et le linge souillé. Aux alentours de vingt-deux heures, les vacancier.es dorment, mais pour l’équipe, la journée de travail est loin d’être terminée. En salle d’animation, c’est l’effervescence. Imaginer, créer, préparer des activités. Cette semaine, iels ont tout misé sur le cabaret de Noël du 24 décembre. Quand la fatigue se fait sentir, l’équipe se rappelle à quel point le séjour compte pour les vacancier.es. Alors, au-delà de penser aux autres, être animateur.ice en séjour adapté, c’est même prendre plaisir à s’oublier. « Je tiens debout encore », dit Sacha

Le cinquième repas 

« C’est le moment où on peut parler d’autre chose que du caca des vacancier.es »

Adrien, directeur adjoint

Tard dans la nuit, vers deux ou trois heures du matin, c’est le moment du « tableau des selles ». Surveiller le transit des vacancier.es, c’est important. Le tableau des selles annonce la fin de la journée de travail et marque le début du « cinquième ». Véritable institution dans le monde de l’animation. Lors du « cinquième » (repas), les bonbons, les chips, le fromage et la décompression s’invitent en salle de réunion. « C’est le moment où on peut parler d’autre chose que du caca des vacancier.es », dit Adrien, le directeur adjoint. L’occasion de renforcer encore, les liens avec l’équipe. La fin du séjour approche et l’émotion gagne du terrain à mesure que la fatigue s’intensifie. La responsable du service loisirs et accompagnement vacances de l’APAH Grand Est avait raison : on a pleuré. 

*[Par respect pour l’équipe et les vacancier.es, les prénoms des salariés ainsi que le nom de l’association ont été rendus anonymes]

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.