Plan d'urgence pour le droit des femmes

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La « grande cause » du quinquennat, un féminisme de façade ?

Critiques du bilan d’Emmanuel Macron, 54 associations féministes poussent les candidats à l’élection à s’engager pour l’égalité.

Du 26 février au 7 mars dernier, la Fondation des femmes a sillonné la France à bord du Train pour l’égalité. Le 4 mars, il était en gare de Lyon Perrache. La fondation tire un bilan mitigé du quinquennat d’Emmanuel Macron. Les actions en faveur de l’égalité femme-homme n’ont pas été à la hauteur des promesses électorales du président. A l’aube d’une nouvelle élection présidentielle, elle lance une pétition interpellant les candidat.e.s. 54 associations signataires réclament au futur gouvernement la mise en place d’un plan d’urgence en 10 étapes pour l’égalité homme-femme. Entre autres mesures phares, un budget d’ 1 milliard d’euros est réclamé pour lutter contre les violences faites aux femmes. Yannick Jadot, Anne Hidalgo, Jean-Luc Mélenchon et Fabien Roussel s’engagent dans leurs professions de fois à verser cet exact montant, réclamé par les associations.

À bord du train pour l’égalité, se trouvaient de nombreuses représentantes des associations réunies autour de la Fondation des femmes. Parmi elles, Sarah Durocher, coprésidente nationale du Planning familial. Malgré quelques réserves, elle s’estime globalement satisfaite du travail entrepris par la ministre déléguée Elisabeth Moreno « à l’écoute des associations ». En 2022, les espaces de vie affective relationnelle et sexuelle (EVARS) gérés par le Planning familial ont par exemple bénéficié d’une augmentation de leurs financements de 20% grâce au Programme 137: « égalité entre les femmes et les hommes ». Si l’association demandait de doubler son financement, elle n’a obtenu que 650 000 euros pour sécuriser et développer ces lieux d’éducation et d’accompagnement. Pour la co-présidente de l’association « c’est bien, mais ça reste un début ». Elle déplore par ailleurs le manque de consistance de la politique d’égalité d’Emmanuel Macron : « il a fallu livrer bataille pour allonger le droit à l’avortement qui est passé tout récemment. Et la PMA pour toutes les femmes a été un combat de deux ans ». Pour elle, ce n’est pas cela faire du droit des femmes la « grande cause » du gouvernement. Elle regrette que le ministère de l’égalité femmes-homme représente la plus petite enveloppe du gouvernement, soit 41,5 millions d’euros en 2021.

Diverses bénévoles de la Fondation des Femmes, présentent dans le train abondent en ce sens. Pour la majorité d’entre elles, les efforts réalisés par le gouvernement se sont centré sur une politique de communication. « Il y a eu un vrai travail autour du numéro d’urgence 39 19 », concède une militante. Qui souligne aussitôt que cette mesure résulte de circonstances liées au confinement. Les activistes critiquent également le manque d’action et d’engagement concret du gouvernement auprès des associations. « Pour une grande cause, on trouve dommage d’avoir eu si peu de moyens mis à disposition », nous explique une représentante de l’association parisienne En Avant toutes. En effet, beaucoup d’engagements n’ont pas été tenus, comme par exemple la création d’un ministère dédié aux droits des femmes, finalement remplacé par la création d’un secrétariat d’état (changé en ministère délégué à l’Égalité au sein du ministère de l’intérieur en 2020). « Toutes les associations étaient prêtes à se mobiliser, disponibles et dans l’attente d’un déblocage de moyen financier. Mais finalement on est déçues. Sur le terrain, les moyens ont peu évolués » nous explique-t-elle.

Le coût écrasant de l’inégalité

Selon le collectif Nous Toutes, recensant les violences faites aux femmes, 1 femme sur 2 a déjà été victime d’agression sexuelle en France, en moyenne 213 000 femmes par an subissent des violences physiques ou sexuelles de leur (ex)conjoint et 113 femmes sont mortes d’un féminicide intra-conjugal en 2021. Or, « Depuis l’affaire Weinstein et le mouvement #metoo en 2017, la parole s’est libérée. Toutes les association à bord du train l’ont constaté », nous explique la co-présidente du planning familial, « Le nombre de victimes contactant les associations augmentent. Et pour leur répondre, nous avons besoin de plus de moyen » explique -t-elle.

« Cela fait un moment que le milliard est un montant sur lequel se sont accordées les diverses associations féministes. C’est un montant basé sur des études très factuelles » nous explique une militante d’En Avant Toutes. « C’est le minimum nécessaire si on veut mettre fin aux violences conjugales. Une femme sur 10 est concernée en France. Si on part du principe qu’il faut les héberger, leur trouver des solutions administratives et juridiques, prendre en charge les auteurs de violence, il faut un milliard pour pouvoir le faire », poursuit-elle. Les activistes féministes aux côtés de la Fondation des femmes demandent de débloquer des moyens importants, mais elles estiment que le coût de l’inégalité est bien plus grand. Dans une étude réalisée en partenariat avec l’agence Edelman, publiée le 8 mars à l’occasion de la journée des droits de la femme, la fondation estime ce coût à 118, 650 milliards d’euros par an en France.


De fait la fondation interpelle les candidat.e.s à l’élection présidentielle afin de « baisser la facture ». Pour l’heure, seul Yannick Jadot a signé la pétition lors d’une halte du train à Marseille.

Charline Deau

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.