La presse espagnole à l’heure des réseaux sociaux

En Espagne, comme en France, l’arrivée d’Internet a bouleversé le paysage médiatique traditionnel. La presse espagnole a, elle aussi, dû s’adapter aux changements amenés par les réseaux sociaux. Mais, les liens entre groupes de presse et géants d’Internet restent complexes, comme l’a montré un récent congrès espagnol, autour de la problématique des droits d’auteur.

Le 7 juin dernier s’est tenu, à Madrid, le Congrès International des droits d’auteur et de la propriété intellectuelle. À cette occasion, plusieurs débats ont eu lieu sur la façon dont les médias et les entreprises d’Internet (Facebook, Twitter, Google, entre autres) doivent travailler pour que les auteurs conservent leurs droits sur la Toile.

La mise en ligne de la presse : « un germe fatal »

Des représentants de médias espagnols étaient présents et ont critiqué le manque de reconnaissance des droits d’auteur sur les réseaux sociaux. Selon eux, il est facile de diffuser n’importe quel type de publication sans avoir à mentionner son créateur, mettant ainsi en danger le travail des journalistes.

José Manuel Gómez Bravo, directeur de la propriété intellectuelle de la chaîne de télévision espagnole SER, a élevé la voix pour demander la création de politiques publiques et de lois pour encadrer les publications et protéger l’auteur.

De son côté, Luis Ventoso, directeur-adjoint d’Abc, important quotidien espagnol, a déploré que la mise en ligne des journaux ait été un « germe fatal » à la généralisation de l’information gratuite.

Du même avis, le président de la Fédération des Associations de la Presse en Espagne (FAPE), Nemesio Rodríguez, a souligné que les réseaux sociaux « ne payent pas leur contenu », une façon, selon lui, de profiter de la crise qu’a traversé la presse espagnole dans les années 2010. D’autant que de nombreux utilisateurs de Twitter ou Facebook utilisent les réseaux pour suivre l’actualité, faisant de l’information un contenu indispensable pour créer du trafic.

Google, donateur pour le développement des médias

Malgré des relations complexes entre journaux et réseaux sociaux, les géants d’Internet s’engagent en Espagne pour le développement des médias. Au début du printemps, Facebook a installé l’un de ses centres de contrôle de « fake news » (fausses informations) à Barcelone. Autre main tendue, l’investissement de Google dans les médias européens, et notamment en Espagne. C’est le quatrième pays à avoir reçu une part des 150 millions d’euros que l’entreprise américaine dédie au financement de diverses initiatives dans les médias,

En tout, ce sont 8,2 millions d’euros qui ont été répartis entre 33 projets espagnols. Et Google investit tant dans les groupes de presse traditionnels comme Prisa ou Unidad Editorial, que dans les médias du web tels que El Español ou eldiario.es.

L’éditeur du quotidien El País a, par exemple, reçu 500 000 euros pour VR-Infographics, un programme qui facilite et intègre la production d’infographies pour les plateformes multi-dispositifs. Une deuxième aide lui a aussi été attribuée, cette fois-ci d’un montant de  450 000 euros, pour Football Data Suite : un système de données en temps réel.

Le site d’informations en ligne eldiaro.es a, quant à lui, bénéficié de subventions du géant américain pour son crowdfunding, lancé lors de sa création. Google participe aussi au projet Leave your Mark du média espagnol, un système qui permet aux lecteurs du journal d’être acteur du site en interagissant avec la rédaction.

Des liens complexes donc, entre des groupes de presse vent debout pour exiger la reconnaissance des droits d’auteur sur Internet, et l’aide nécessaire de l’argent détenu par les géants du web pour faire évoluer l’information et l’adapter au monde d’aujourd’hui.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.