Le fact-checking, détecteur de mensonge des politiciens

 

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Comment distinguer le vrai du faux dans le discours politique ? Grâce au fact checking ! Cette pratique récente, qui systématise la vérification des déclarations par les faits, dépasse la sphère médiatique et prend une place incontournable dans le débat public.

« Le Shazam de la vérité » : c’est la définition du fact checking selon Cory Haik, la responsable du projet Truth Teller. Dans le domaine politique, le fact checking ne s’inquiète pas de savoir si les hommes et femmes politiques vont tenir leurs promesses : il s’attache plutôt à vérifier la véracité et l’exactitude de leurs déclarations. La campagne présidentielle américaine en a donné un parfait exemple : les propos des candidats ont été étudiés à la loupe par la presse, qui n’a cessé de démonter les affirmations mensongères de Donald Trump.

S’il a gagné ses lettres de noblesse aux États-Unis, le fact checking est bien présent en France. Lorsque Marine Le Pen estime qu’il y a 10 millions de fausses cartes Vitale en circulation en France, la presse s’est empressée de rectifier le tir. Même chose lorsque Nicolas Sarkozy a affirmé avoir été présent à la chute du mur de Berlin en 1989. La plupart des grands médias français disposent de leur section consacrée au fact checking, comme « Désintox » chez Arte et Libération et « Les Décodeurs » au Monde. Yann Barthès, l’ancien animateur du « Petit Journal » de Canal+ passé sur TMC, s’est aussi fait une spécialité d’inspecter dans le détail les faits et gestes des politiques.

Le b.a.-ba du travail journalistique

Vainqueur du prestigieux prix Pulitzer en 2009, PolitiFact.com fait figure de pionnier du fact checking avec son « Truth-O-Meter », où les déclarations des candidats politiques sont vérifiées et décodées. Cette démarche redynamise le travail du journaliste et le recentre vers une de ses missions principales, si ce n’est une règle d’or, celle de la vérification de l’information.

Une mission qui motive Cédric Mathiot, le créateur du « Désintox » de Libération, qui parlait de « service minimum » de vérification de l’information lorsqu’il a demandé à être détaché de la rubrique « Transports ». Les politiques, explique-t-il, font très souvent des fautes que la plupart du temps les journalistes ne relèvent pas : « ils parlent de sujets qu’ils ne maîtrisent pas et, du coup, récitent des éléments de langage et multiplient les erreurs, intentionnelles ou non. » Par sa régularité, le fact checking ne permet pas seulement de distinguer le vrai du faux, mais de faire la part entre l’approximation maladroite et le mensonge savamment échafaudé.

Parce qu’il s’érige en tenant d’une vérité immuable, le journaliste spécialiste du fact checking doit être encore plus vigilant dans ses affirmations que ses confrères. Loïs Siggen Lopez, co-présentateur de « Factuel », une chronique de la chaîne suisse RTS, estime ainsi que « le fact-checking est du journalisme sous contraintes ». Surtout lorsque les personnes « fact-checkées » attaquent cette pratique, jusqu’à en faire une arme du « système », voire une mal de « la société néolibérale ». Plus mesuré mais pas moins critique, Frédéric Lordon, sociologue et chercheur au CNRS, s’inquiète lui que le fact checking fasse qu’« il n’y a plus rien à discuter, hormis des vérités factuelles. »

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.