Journalisme 360° : une réalité (virtuelle) bientôt inévitable

Véritable star de ces dernières années, la réalité virtuelle n’est plus qu’un simple gadget. Valorisée par l’arrivée des casques sur le marché, la VR s’invite partout : dans les jeux vidéo, au cinéma, sur les réseaux sociaux… Un pari révolutionnaire qui intéresse désormais aussi les rédactions. Mais la réalité virtuelle a-t-elle vraiment sa place dans le traitement de l’information ?

ARTE360, le Parisien 360… La réalité virtuelle, nouveau terrain d’expérimentation pour les médias, est en plein essor. En novembre 2015, le New York Times crée la surprise en distribuant plus d’un million de Google Cardboard à ses abonnées, leur permettant de visionner les premiers contenus en 360° du géant américain. Six mois après, ce sont plus de cinq millions de personnes qui utilisent l’application NYT VR. Une réussite qui favorise le lancement des autres rédactions dans le 360°.

Dernière création remarquable en date : le documentaire 6X9 crée par The Guardian, disponible sur Google Cardboard et Gear VR. Pendant neuf minutes, le spectateur est transporté dans une cellule d’isolement d’une prison américaine. Un travail qui a demandé huit à neuf mois de réalisation.

Le choix du sujet

Même si les résultats obtenus sont pour l’instant à la hauteur, la pratique de la réalité virtuelle d’aujourd’hui n’est qu’un début. « On peut comparer l’évolution de la VR à la téléphonie. On est passé du téléphone à clapet au smartphone en très peu de temps. Dans dix ans, la réalité virtuelle aura tellement évolué que celle d’aujourd’hui nous semblera entièrement dépassée » explique Raphaël Beaugrand, journaliste et directeur de production en réalité virtuelle pour le studio OKIO Production.

Pour l’heure, l’enjeu des rédactions est de trouver des sujets à réaliser en 360°. Car tout ne s’y prête pas. L’utilisation de la VR se limite à une pratique d’information-spectacle mêlant immersion, subjectivité, émotion et divertissement. Les sujets réalisés en 360° sont surtout forts en sensation : immersion dans une ville dévastée par la guerre en Syrie, entrée dans un centre de légionnaires en Guyane… « Pour le moment, nous n’imaginons pas pouvoir expliquer des sujets complexes ou de fonds, par exemple l’affaire Clearstream, grâce à la réalité virtuelle. Mais ça sera sans doute possible un jour, si on développe davantage la réalité augmentée à l’intérieur de la réalité virtuelle. Il faut imaginer les possibilités » affirme Raphaël Beaugrand.

Le journaliste n’est plus le seul à être en immersion

L’intérêt de la réalité virtuelle se porte donc sur l’immersion. Le journaliste doit trouver le meilleur angle possible pour transmettre aux spectateurs un sentiment de présence, leur permettant de vouloir aller jusqu’au bout de l’expérience. La technologie embarquée de la réalité virtuelle permet d’avoir la sensation d’être à un endroit, sans y être réellement. Le public devient alors le cadreur du reportage. Il est actif dans la découverte de la scène, de l’endroit. Il est libre de regarder là où il le souhaite, il se sent transporté, comme ailleurs.

Dans le 360°, le journaliste s’efface, il ne joue plus le rôle de médiateur entre l’information et le public. Il ne contrôle plus le champ de vision ni le regard du spectateur. La transparence devient de rigueur et le journaliste ne peut rien cacher, rien transformer, rien déformer. Reste à savoir quelles seront les futures limites éthiques imposées à la réalité virtuelle, qui ne demande qu’à être développée. 

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.