Un journaliste salvadorien tué par un gang

Les tatouages d'un membre de MS-13. Image <a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:MS-13_tattoo_2.jpg">département américain de l'Intérieur</a>.
Les tatouages d’un membre de la MS-13. Image département américain de l’Intérieur.

 

Après le Mexique et le Guatemala, un journaliste vient une nouvelle fois d’être tué en Amérique du Sud. C’est au Salvador que Nicolás Humberto García a été assassiné le 10 mars dernier. Ses assassins ? Des membres de la MS-13, un gang qui sème la terreur dans tout le continent.

Nicolás Humberto García avait seulement 23 ans. Depuis quelques mois, il animait une émission sur Expresa Voces Al Aire, une radio communautaire émettant à El Carrizal. Mais son programme n’était pas seulement informatif : il donnait aussi la parole à la Police nationale civile (PNC), et prodiguait des conseils sur la protection contre la violence. Une ligne qui n’était du goût de la MS-13, aussi connu sous le nom de Mara Salvatrucha.

D’abord menacé de mort, Nicolás Humberto García a ensuite reçu une proposition de la part de ce gang créé en 1980. Contre cent dollars par mois, il devait rejoindre les rangs de la Mara Salvatrucha, et informer ses membres des différents mouvements de la police à El Carrizal. Son refus, mais surtout le succès de son émission, lui a été fatal. Dans la nuit du jeudi 10 mars, Nicolás Humberto García a été retrouvé criblé de balles, son cadavre mutilé et sa langue coupée.

La MS-13 a été formée à Los Angeles, en Californie. En seulement quelques années, ce gang est devenu l’un des plus violents du monde, qui s’en prend régulièrement aux journalistes. En 2008 par exemple, Christian Poveda avait réalisé La Vida Loca, un documentaire sur les gangs salvadoriens parmi lesquels la Mara Salvatrucha. Trois semaines seulement avant la sortie en salle, il était retrouvé mort. Ce reporter franco-espagnol a été tué par ceux auxquels il a consacré près de quatre ans de sa vie.

L’inquiétante situation du journalisme en Amérique latine

Les réactions au meurtre de Nicolás Humberto García ont été nombreuses. Reporters sans frontières (RSF), l’Association des journalistes du Salvador (APES) et l’Association des radios et des programmes participatifs du Salvador (ARPAS), ont exigé la création et la mise en place rapide d’une loi de protection pour les journalistes du Salvador. « Nous sommes profondément choqués par cet acte barbare et demandons aux autorités salvadoriennes d’identifier et de juger les coupables de ce crime odieux »a notamment déclaré Emmanuel Colombie, responsable du bureau Amériques de RSF. La Société interaméricaine de presse (SIP) ou encore l’UNESCO ont également demandé que toute la lumière soit faite sur cette affaire.

Comme un symbole, seulement quelques jours après ce nouvel assassinat, la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) a publié son rapport annuel sur la liberté d’expression. Et le bilan est alarmant : le nombre de journalistes tués sur le continent augmente d’année en année. 18 en 2013, 25 en 2014, 27 en 2015 : « notre hémisphère est devenu l’une des régions les plus dangereuses pour exercer le journalisme, et les agressions, comme les assassinats ou les séquestrations, sont aujourd’hui l’une des pires formes de censure », explique le rapport.

La mort de Nicolás Humberto García vient s’ajouter à celles de journalistes au Mexique ou encore au Guatemala. Avec un début d’année aussi meurtrier, les propos de la CIDH n’ont jamais semblé aussi vrais.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.