En stage : « et si tu parlais de la guerre ? »

Voilà bientôt trois mois que je suis en stage à Londres. Trois mois que je pose ma voix tous les jours à la radio, pour une revue de presse internationale. Il y a deux semaines, la directrice générale de cette radio décide de relancer le blog créé il y a quelques mois, et trop peu alimenté ces derniers temps. Elle me demande donc une production, sans m’imposer de sujet. Enfin presque. Il faut du sang, de la guerre, des larmes. 

C’est le regard un peu naïf d’un jeune étudiant en journalisme que je vais exposer ici. J’effectue mon troisième stage dans le domaine, et le même aspect du métier a retenu mon attention à chaque fois : la nécessité de composer, à une échelle plus ou moins grande selon le type et la taille du média, avec des obligations économiques et commerciales. Des obligations susceptibles d’influer sur les choix éditoriaux et le traitement de l’information.

C’est un aspect dont je n’ai jamais entendu personne se vanter. Un aspect intégré plus qu’accepté par les journalistes que j’ai côtoyés, et toujours sous-entendu, rarement clairement énoncé. Mais cette fois-ci et pour la première fois, la consigne est : « Arthur, il y a plein de guerres de partout, et c’est malheureux, mais les gens aiment ça. On a besoin qu’ils viennent sur le site internet, n’oublie pas que l’on est une radio commerciale. » Pour la première fois, on me fait clairement comprendre que sur ce cas-là, informer les lecteurs ou auditeurs de manière pertinente n’est pas la priorité. Pour la première fois, j’ai l’impression que l’information n’est qu’un prétexte pour faire rentrer plus d’argent dans les caisses.

Et voilà pourquoi : à ce moment-là, aucun sujet « tragique » ne se démarque particulièrement dans l’actualité. Au point que l’on me suggère de faire un point sur « l’après-Charlie Hebdo »… Cette radio cible pourtant les expatriés français : les choix éditoriaux se font normalement en fonction de cette cible, et à la manière du petitjournal.com, le choix se porte régulièrement sur des sujets plutôt légers et décalés. Cela avait d’ailleurs été le cas pour le dernier article publié sur le blog, avec un billet d’humeur sur l’Eurostar. Mais pour cette fois, la ligne éditoriale a paru être mise de côté un instant.

Bien sûr, la radio en question ne traite pas tous les programmes de la même manière. C’est un exemple bien particulier, pas une généralité. Mais les enjeux commerciaux s’immiscent tout de même assez régulièrement dans mon travail. Cela est surtout le cas avec les publireportages que j’ai eu à réaliser, quatre pour le moment.

Cette omniprésence des notions d’audience, de bénéfice, de résultat, est une réalité. Elles sont indispensables à la survie d’un média et influencent, qu’on le veuille ou non, les choix éditoriaux. Mais je refusais d’y croire jusqu’ici. Je m’efforçais de croire à un mythe, qui veut que les journalistes informent dans le seul but d’informer.

« En stage » est une série d’articles plus personnels qu’à l’accoutumée, consacrés à des expériences ou des observations réalisées par les étudiants du Master 1 « Nouvelles pratiques journalistiques » de l’Université Lumière Lyon 2 lors de leur stage obligatoire à l’étranger.

 

 

 

 

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.