13 novembre : la « prudence » des chaînes info

Dans la nuit du 13 au 14 novembre, les médias étaient tous sur le qui-vive, suivant minute par minute le déroulé des attentats de Paris. La présence de Bruce Toussaint, journaliste vedette de la chaine I>Télé, sur le plateau de « Touche pas à mon Poste » le mardi suivant, a ouvert une discussion sur la prudence avec laquelle les chaînes d’information en continu ont couvert ces événements.

Bruce Toussaint
Image Georges Biard.

« C’est sans filet… Et les informations qui tombent sont dramatiques. » C’est ainsi que Bruce Toussaint définit son expérience sur le déroulé des événements du vendredi 13 novembre. Absent de l’antenne ce jour, le présentateur de la matinale est appelé par sa chaîne dès les premières rumeurs d’attaques terroristes dans la capitale française. Il se déplace et prend les commandes d’une édition spéciale qui va durer une bonne partie de la nuit. Ce qui ressort de son témoignage, ce sont les précautions qu’ont pris les journalistes avant de transmettre l’information aux spectateurs.

Sur le plateau de Touche pas à mon poste (D8), Bruce Toussaint revient sur certaines news qui auraient été sciemment éludées par I>Télé dans son édition spéciale nocturne. Il semblerait que les journalistes aient été au courant des premières attaques bien avant de diffuser l’information. Ce fait se voit confirmé par le témoignage de Gilles Verdez, chroniqueur dans l’émission de D8 et journaliste sportif sur I>Télé. Ce dernier a envoyé plusieurs SMS pour prévenir ses proches bien avant que les médias aient donné l’alerte.

Bruce Toussaint l’affirme : « notre rôle, en tant que journalistes de chaîne info, c’est de donner l’information au plus vite. » Alors pourquoi avoir attendu ? Cette question, de nombreux spectateurs l’ont posée sur les réseaux sociaux ce week-end. Gilles Verdez donne une réponse partielle : « J’avais cette info, mais je ne savais pas quoi en faire. » Car oui, la nouvelle des attaques terroristes a brûlé les doigts des journalistes vendredi soir. Diffuser ? Susciter la panique ? Nuire au travail des enquêteurs ? Autant de questions à prendre en considération avant d’agir.

Vidéo de Touche pas à mon poste

Mais après avoir révélé les attaques, les chaînes info ont misé sur la prudence. Mardi, Touche pas à mon poste a rediffusé un extrait de l’édition spéciale d’I>Télé. En duplex, un journaliste affirme qu’il connaît le nombre de personnes présentes au Bataclan. Il ajoute qu’il ne peut pas le révéler. La voix de Bruce Toussaint retentit alors : « Prudence ! Prudence sur les événements qui se déroulent en ce moment au Bataclan ! » Des précautions saluées par Valérie Benaïm, productrice télé et chroniqueuse sur D8 : « Les médias ont été exemplaires. Ils ont retenu les leçons de janvier dernier. »

On peut justement se demander si les chaînes info n’ont pas opté pour la prudence par crainte du CSA. Après les attentats de janvier 2015, I>Télé avait écopé d’un avertissement pour avoir révélé des informations qui auraient pu nuire au travail de la police. La chaîne risquait alors la suspension d’antenne, ce qui aurait coûté au groupe Canal+ une importante perte de capital. Bruce Toussaint défend cependant sa chaîne d’avoir eu une démarche mercantile ce soir-là : « Ce sont des moments exceptionnels, extraordinaires, qui font que ces questions sont oubliées ».

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.