En Belgique, les mooks se développent aussi

Pour son quatrième numéro, le premier mook belge 24h01 revisite sa formule et réadapte sa maquette. L’occasion de faire le point sur ce nouveau format, en pleine expansion en Belgique.

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À la croisée du livre et du magazine, le mook est d’abord apparu en France avec la Revue XXI. Depuis sa création en 2008, l’offre s’est étoffée sur le marché francophone mais les nouveaux modèles apparus doivent encore faire leur preuve. Trimestriel ou semestriel, épais d’environ cinquante pages, original dans ses sujets et riche dans son design et ses illustrations, le mook séduit un lectorat très large et encore peu défini, pour un prix avoisinant les 15 euros. Autre avantage incontestable : l’absence totale de publicité. Le budget du mook repose principalement sur les abonnements.

En Belgique, c’est 24h01 qui paraît pour la première fois fin 2013. Dès sa sortie, il est vendu à 3 800 exemplaires. Son quatrième tome, tout juste sorti dans les librairies, est le résultat de plusieurs leçons tirées par les principaux éditeurs. La mise en page a connu certaines modifications et, à l’occasion de son quatrième volet, le premier mook belge a développé son site Internet. « Il y a eu un engouement pour le lancement et beaucoup d’attentes alors que les fonds étaient plutôt maigres et le produit expérimental, explique Quentin Jardin, nouveau rédacteur en chef. Les lecteurs ont été déçus. Pour le numéro 2, nous n’avons vendu que 2 500 exemplaires. Le troisième a changé de mise en page et on est remontés. Dans ce nouveau numéro, il y a une forte évolution : on va plus loin dans la nouveauté, la mise en page, le site internet… On espère atteindre les 4 000 exemplaires. »

L’objectif reste assez faible, en comparaison aux 50 000 exemplaires de Revue XXI, son homologue français, vendus après sept ans de publication. Mais se cantonner à cette comparaison relève davantage de l’absurde, le marché français n’ayant bien sûr rien à voir avec le nombre de lecteurs potentiels de la Belgique francophone.

Réintégrer la tradition des belles revues

Après 24h01, c’est au tour de Karoo, plutôt axé sur l’actualité culturelle, de se développer. Deux numéros ont été publiés. Selon Laurent Corbeel, son directeur de publication, « le mook n’est qu’une vitrine de notre plateforme en ligne. Karoo s’inscrit dans la tradition des revues. Mook est un mot-valise pratique pour communiquer mais c’est tout. On réintègre la tradition des belles revues ».

Une volonté qui se traduit aussi par la sortie de Médor, troisième magazine du genre. Fruit de trois ans de réflexions et d’idées, Médor regroupe une équipe de 17 journalistes, photographes et illustrateurs. Son premier numéro devrait sortir en septembre 2015. Précis dans son slogan, il affirme être « le trimestriel coopératif belge d’enquêtes et de récits ».

À en croire ce bourgeonnement de mooks chez les Belges, le lectorat serait friand de long format et d’illustrations soignées. Mais la situation reste très fragile et rien n’est assuré. Médor et Karoo dansent encore sur un fil. Une des principales difficultés résiderait aussi dans le fait que Revue XXI ferait de l’ombre à ses concurrents belges, même en Belgique. Selon Marie Vanoost, spécialiste du journalisme narratif actuellement en doctorat à l’Université Catholique de Louvain, « En Belgique, les mooks sont dans une situation difficile car comme il existe déjà XXI pour les sujets étrangers, ils sont obligés d’apporter leurs particularités régionales ».

Alors, trop de mooks belges nuit-il au mook belge ? Pas forcément. Si 24h01, Médor et Karoo parviennent chacun à définir une ligne éditoriale unique et précise, ils pourront rester sur le marché. Olivier Hauglustaine, direction de publication de 24h01, semble d’ailleurs assez serein : « Il y a bien une place pour 24h01 en Belgique malgré la perméabilité, aussi, du marché belge au marché français ».

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.