Une génération Y bien informée… sans le faire exprès ?

Crédits photo: http://www.jisc.ac.uk
Crédits photo: http://www.jisc.ac.uk

À l’heure du numérique, une certaine inquiétude plane quant à l’intérêt que portent les jeunes aux questions d’actualité. Cependant, dans quelle mesure ce mythe d’une génération désinformée est-il légitime ? En publiant ce 16 mars 2015 une étude sur les comportements de la consommation de l’information des jeunes Américains, l’American Press Institute fait tomber quelques idées reçues.

À commencer par quelques révélations : loin d’être incultes, 85 % des jeunes Américains considèrent important le fait d’avoir accès à l’information et deux sur trois consomment de l’information régulièrement. Ce que l’étude révèle surtout, c’est que Facebook représente à présent la principale source qui permet aux jeunes de « tomber » sur l’info. Alors si les jeunes suivent encore l’actualité, le font-ils exprès ? Que signifie le concept de « l’information par accident » et est-ce nécessairement négatif ?

L’étude, intituléeHow Millennials Get News: Inside the habits of America’s first digital generation”  ou « Comment la Génération Y s’informe : les pratiques de la première génération digitale américaine », a été menée sur 1 046 jeunes américains âgés de 18 à 34 ans. Cette tranche d’âge correspond à ce que les Américians appellent les Millennials, jeunes devenus adultes dans le nouveau millénaire et première génération à avoir grandi avec le numérique. Aujourd’hui, près de 90 % de ces jeunes avouent consommer de l’information via Facebook, en admettant que l’information n’est pas la raison pour laquelle ils se connectent. D’où l’idée d’« information par accident ».

Les jeunes tombent sur l’information par hasard d’accord, mais pourquoi la lisent-ils ou s’y intéressent-ils ? Selon l’enquête, « les jeunes consomment de l’information pour plusieurs raisons dont des motivations de nature civique (74 %), le besoin de résoudre des problèmes (63 %) et des facteurs sociaux (67 %), comme en parler avec des amis. »

Un phénomène nouveau ?

Pas selon les auteurs du rapport de l’American Press Institute. Pour eux, « les gens ont toujours découvert les faits d’actualité en partie par accident, que ce soit par le bouche à oreille, en tombant dessus en regardant la TV ou en écoutant la radio, et se tournent ensuite vers d’autres sources pour en apprendre davantage. »

Il semblerait alors que les réseaux sociaux n’aient pas créé le phénomène de l’information par accident mais qu’ils se contentent de l’accentuer. Si Facebook domine largement, cette génération utilise une variété de réseaux sociaux comme premier canal de l’information. Parmi eux, Youtube talonne Facebook (utilisé pour obtenir de l’information de façon occasionnelle à 83 %), mais aussi Instagram (50 %), Pinterest (36 %) ou Twitter (33 %). Ceux à la recherche active d’actu se tourneront plutôt vers de nouvelles plateformes comme Reddit. Si la majorité des jeunes intérrogés admettent visiter ces réseaux pour des raisons sociales, le partage d’articles et de faits d’actualité sur ces mêmes plateformes leur permet de s’ouvrir à de nouveaux sujets.

Capture d'écran www.americanpressinstitute.org
Capture d’écran www.americanpressinstitute.org

 

Presse et paresse

Obtenir l’information et la comprendre ne représente plus nécessairement un effort. Aujourd’hui, les junkies de l’information savent la hiérarchiser à partir des réseaux sociaux. Certains logiciels de gestion tels que HootSuite peuvent d’ailleurs les aider. La profondeur des connaissances dans chaque domaine peut certes être discutable, mais ces personnes semblent accumuler des notions sur un grand nombre de sujets.

La perte de l’habitude de payer pour s’informer témoigne aussi que les efforts liés à la recherche d’info s’amoindrissent de nos jours.

“a clear minority of young people are paying for news and information.”

L’enquête démontre en effet qu’« une minorité de jeunes payent pour accéder à l’actualité et aux informations. » Et bien que 93% des jeunes interrogés déclarent adhérer à au moins un service proposé par les médias, moins de la moitié d’entre eux disent payer pour ce service d’information. En 2015, payer pour s’informer n’est plus une évidence.

De quel type d’information parle-t-on?

Information gratuite, information par accident… Mais quel type d’information les jeunes consomment-ils ? Contrairement aux idées reçues, ils ne se limitent pas à l’actu légère comme le divertissement ou le sport mais 45% consommeraient au moins cinq ou plus sujets de hard news (sujets sérieux) régulièrement, c’est à dire de nature politique, technologique, économique, ou les sujets de société.

Capture d'écran www.americanpressinstitute.org
Capture d’écran www.americanpressinstitute.org

Avec une temporalité de l’actualité qui a évolué plus que jamais avec cette génération Y, les médias ne peuvent plus se permettre de ne pas être présents sur les réseaux sociaux. De plus, l’actualité se partage et se commente sur ces plateformes, ce qui favorise la diversité des points de vue. Ainsi, 70% des sondés déclarent que leur fil d’actu est composé d’opinions différentes.

Il serait cependant faux de penser que les jeunes obtiennent la totalité de leurs infos via les réseaux sociaux. L’American Press Institute souligne d’autres voies comme la recherche par thématique à travers les moteurs de recherche ou les blogs ou encore les groupes de médias indépendants qui regroupent des articles venant de supports divers sur un sujet précis.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.