Les supporters tenant des propos discriminatoires peuvent être sanctionnés de 15 000 euros d'amende et d'un an d'emprisonnement.

Discrimination dans le foot : des instances trop laxistes

Alors que les propos discriminatoires se multiplient sur les terrains de football, des joueurs ou des équipes décident de quitter le terrain en plein match. Un acte fort qui est rarement suivi par les instances dirigeantes.

Le 1er octobre, Collin Martin, un joueur des San Diego Loyal (deuxième division américaine) est victime d’insultes homophobes par un des défenseurs de l’équipe adverse des Phoenix Rising Junior Flemmings. Ses coéquipiers quittent alors le terrain à la mi-temps pour soutenir ce footballeur qui avait fait son coming-out deux ans auparavant.

La plupart du temps, c’est l’acte d’un joueur isolé qui, excédé par des propos discriminatoires, part du terrain de son plein gré. Ainsi, Moussa Marega, l’attaquant malien du FC Porto (Portugal), a quitté la pelouse en février dernier lors du match qui l’opposait au Vitoria Guimarães suite à des insultes racistes des supporters adverses. Ses coéquipiers n’ont pas été solidaires de son action et ont essayé de le dissuader.

Un règlement qui reste timide

Une absence de solidarité qui peut s’expliquer par des raisons sportives. En effet, une équipe qui quitte le terrain de jeu risque de perdre le match sur tapis vert. La sanction est une défaite 3 à 0. Une absurdité qui a poussé la Fédération Internationale de Football (FIFA) en juillet 2019 à agir et à modifier la réglementation. « Sauf circonstances exceptionnelles, si un match est définitivement arrêté par l’arbitre à cause de comportements racistes et/ou discriminatoires, il sera déclaré perdu sur tapis vert [pour l’équipe incriminée] », déclare la nouvelle version.

Pour rappel, l’arbitre peut d’abord demander l’arrêt du match et un message d’avertissement de la part du speaker. Si les incidents persistent, il a la possibilité de le suspendre en renvoyant les joueurs au vestiaire et enfin de l’arrêter définitivement. Il est considéré comme propos discriminants tout ce qui touche à la « couleur de peau, l’origine ethnique, géographique ou sociale, le sexe, le handicap, l’orientation sexuelle, la langue, la religion, les opinions politiques, la fortune, la naissance ou tout autre statut ». 

Cette réglementation ne s’applique qu’aux matchs dépendant de la FIFA, soit les éliminatoires et la la phase finale de la Coupe du monde. Si l’on regarde du côté de l’Union des associations européennes de football (UEFA), il existe un règlement mais qui reste timide. C’est l’arbitre qui peut d’abord arrêter la partie, puis la suspendre et enfin l’abandonner si « le comportement raciste est d’une grande ampleur ou d’une grande intensité ». Un cas de figure qui est encore très rarement appliqué. Une situation préoccupante, d’autant plus que la majorité des matchs durant la saison sont soumis à la réglementation de l’UEFA.

Comment arriver à identifier un supporter pour ne pas risquer d’en pénaliser l’ensemble ?

Outre la possibilité pour une équipe de perdre sur tapis vert, de nombreuses sanctions peuvent être mises en place à l’encontre d’un club, d’un joueur ou d’un supporter en cas de propos discriminants. Si l’on prend l’exemple de la France, ce sont la Ligue de Football Professionnel (LFP) ou la Fédération Française de Football (FFF) qui pénalisent un club. Elles peuvent aller d’une simple amende à un retrait de points au classement en passant par des matchs à huit clos. Pour les joueurs, des matchs de suspension sont appliqués.

Les supporters, eux, sont sous soumis à la loi française. Ils peuvent être sanctionnées d’une amende de 15 000 euros et d’un an emprisonnement en cas de propos racistes ou discriminatoires, selon l’article L 332-6 du code du sport. Une interdiction de stade peut aussi être administrée. Sa durée maximale est de 3 ans en cas de récidive. Des sanctions en réalité plus clémentes pour les rares cas de condamnation de supporters. Ainsi, le 4 juillet 2019, un supporter de Lens a été condamné à 10 000 euros d’amende avec sursis et à 5 heures d’activités d’intérêt général pour avoir été l’instigateur d’un chant homophobe lors d’un match contre Valenciennes le 12 avril 2019.

Un autre problème de taille persiste : comment arriver à identifier un supporter pour ne pas risquer d’en pénaliser l’ensemble ? Des mesures ont commencé à être mises en place. Par exemple, la LFP associée à la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) a lancé en juillet 2019 un formulaire de signalement anonyme pour les victimes des propos racistes, antisémites ou homophobes dans un stade de football. « L’idée étant d’aider (une victime) à faire reconnaître qu’elle a été injuriée, insultée, discriminée en trouvant des témoins, faisant en sorte que l’auteur soit identifié, notamment grâce aux enregistrements vidéos, et rapidement sanctionné », explique Mario Stasi, le président de la Licra.

Un procédé qui questionne parfois le respect des libertés individuelles. En Italie, la fédération voudrait utiliser un radar passif. Ce dispositif, utilisé par les services antiterroriste, capte les bruits en direct à l’aide de micros directionnels. Une mise sous écoute des supporters critiquée en raison de potentielles atteintes à la vie privée.

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.