Raphaël Ruffier-Fossoul

Portrait de Raphaël Ruffier-Fossoul, créateur de L'Arrière-Cour, média indépendant de la métropole lyonnaise.

De « Sous les Marches » à « L’Arrière-Cour » : Raphaël Ruffier-Fossoul, une vie dédiée au journalisme

Journaliste puis rédacteur en chef de Lyon Capitale depuis presque 20 ans, Raphaël Ruffier-Fossoul lance son nouveau média indépendant, l’Arrière-Cour. L’occasion de revenir sur son parcours, ses objectifs et sa vision du journalisme.

Sur le pallier, les vélos d’enfants sont entassés, sur la porte, les décorations d’Halloween sont encore accrochées. C’est un homme pressé qui nous accueille au 5èmeétage d’un immeuble dans le sixième arrondissement de Lyon. A peine arrivée, que déjà il m’explique avoir un mail urgent à traiter avant notre entretien. Dans son appartement, où les souvenirs de voyages côtoient les chaussures d’enfants, où la bibliothèque imposante laisse une place au sapin de Noël, c’est à son bureau qu’il passe le plus clair de son temps en ce moment. Et pour cause : Raphaël Ruffier-Fossoul est en plein lancement de son nouveau média, L’Arrière-Cour.

Un journaliste depuis toujours

Ce goût pour l’écriture et l’information, ce Lyonnais d’origine l’a dans le sang. Déjà âgé d’une dizaine d’années, il lance avec un ami un journal intitulé « Sous les Marches ».  Il participera ensuite au journal de son collège, puis de son lycée. Il y apprend l’importance de sujets proches des lecteurs. « Au début on traitait de politique internationale, puis on a écrit sur la vie du lycée, et tous les élèves nous lisaient ».  Il poursuit ces études à l’université Lumière Lyon 2. Il s’engage au sein du syndicat étudiant UNEF-ID en 95. Mais ce « passionné de la chose publique » comprend vite que la politique ne lui convient pas. 

Cependant cet engagement militant lui permet, lors d’un blocage organisé à Lyon 3, de rencontrer un journaliste de Lyon Capitale. Il le croise quelques temps plus tard, lui parle de son ambition de devenir journaliste, et se voit proposer un stage. Il est alors en Maitrise d’Histoire. Pendant son stage, il tient à faire ses preuves. Sa stratégie ? « Un jeune journaliste dans une rédac doit se faire remarquer avec ses histoires ». Dans son cas, il s’agira d’une histoire… de tortues !

Il change de chaise pour me raconter ce qu’il décrit comme une de ses meilleures anecdotes. Alors stagiaire, le rédacteur en chef de l’époque lui confie un sujet autour de l’inauguration d’un bassin à tortues au parc de la Tête d’Or. Ce qui devait être une simple conférence de presse se transforme en une véritable investigation. Ces bassins accueillent les tortues gagnées dans les Vogues par les gônes chaque année, mais qui grandissent bien trop et sont abandonnées par leurs petits propriétaires. Sauf qu’avant, ces bassins n’existaient pas pour accueillir ces tortues, qui restent d’ailleurs trop nombreuses pour ces installations. Comment les responsables du parc traitent-ils les restantes ? Il finit par découvrir qu’elles étaient écrasées par un énorme rouleau compresseur. L’article retient l’attention de son rédacteur en chef, fait la Une, et lance la carrière de Raphaël à Lyon Capitale, en 2000.

L’impact des mots

Pendant près de 20 ans, il travaille pour Lyon Capitale. Manier les mots, c’est ce qu’il préfère, que ce soit pour la presse écrite, mais aussi pour la radio, ou en tant qu’animateur ou chroniqueur pour la télévision. Il trouve particulièrement intéressant de mener des entretiens. Il me cite celui avec Nicolas Sarkozy ou encore Emmanuel Macron pendant les présidentielles. En 2007, il devient rédacteur en chef de Lyon Capitale. Ce qui l’importe dans son équipe c’est la diversité. A l’image de son appartement, il aime quand les styles se mélangent et se complètent. Il essaye de laisser les portes ouvertes à tous les horizons et participent entre autres à des projets scolaires à Vénissieux. 

Homme aux multiples talents, il a également co-écrit deux film-documentaires, dont le dernier, « De Gérard à Monsieur Collomb, itinéraire d’un baron » lui vaudra d’être « débarqué » de Lyon Capitale. A l’approche des municipales, son objectif en tant que rédacteur en chef était clair : « permettre aux alternatives de dialoguer ». Un objectif qui ne plaît pas à l’actionnaire du mensuel, qui d’après Raphaël souhaite la réélection de Gérard Collomb. Qu’à cela ne tienne, il n’abandonne pas son objectif : l’Arrière-Cour est né. 

« Tremblez puissants, je me suis acheté un stylo tout neuf »

Privé du média où il travaille si peu de temps avant les élections municipales, il veut quand même « être présent journalistiquement ». Il pense lancer un site internet, son frère lui suggère le format newsletter. En quelques jours, il réunit une équipe de journalistes intéressés et lance une campagne de financement. Quand je le rencontre, l’objectif de base est atteint, il espère encore recevoir quelques dons. Pour cette première création d’entreprise, un défi dont il se serait bien passé mais néanmoins formateur, l’objectif est est de fournir la newsletter avec des articles longs, documentés, des enquêtes proches des préoccupations des gens. Le média est pensé comme éphémère, mais a vocation à devenir « autre chose ». Une chose est sûre, son créateur ne manque pas d’envies ni d’idées. Alors que le dessinateur Guillaume Long le représente déclamant « « Tremblez puissants, je me suis acheté un stylo tout neuf », il me confie des envies de BD-reportages, de revue… 

Logique de vérité, donner les clés pour se créer son opinion, vecteur de mobilisation… Entre deux coups de téléphone concernant l’Arrière-Cour, il me parlera du journalisme d’un ton passionné. Le petit reporter de « Sous les Marches » est toujours là. Plus que jamais, Raphaël Ruffier-Fossoul veut faire des choses qui ont du sens. « Se dire : aujourd’hui, j’ai été utile. Ma contribution au débat public est modeste mais modestement utile ».

Auteur

Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.