En Thaïlande aussi, on menace les journalistes

Le 25 mars, le général Prayut Chan-o-Cha a fait sursauter bien des stylos durant sa conférence de presse. Lorsqu’un journaliste lui a demandé ce qu’il comptait faire de ceux qui n’adhéraient pas à la ligne de conduite du gouvernement, celui-ci a répondu avec sérieux « nous allons probablement juste les exécuter. »

En vérité, le chef de la junte militaire est un adepte des déclarations choc. Premier ministre de Thaïlande depuis le coup d’état en mai 2014, adversaire convaincu de l’ancien premier ministre Thaksin et instigateur de la répression sanglante des chemises rouges, ce général n’a pas la langue dans la poche. Un mois plus tôt, il avait déclaré avoir le pouvoir d’arrêter les médias. Autre fait d’armes : il déplorait la mise en place d’une démocratie en Thaïlande, qui empêchait le gouvernement de « restreindre les libertés ». Il n’en a pas fallu plus pour que Reporters sans frontières classe le général parmi les « prédateurs de la liberté de la presse », en compagnie de Poutine, Kim Jong Un ou encore Bachar Al Hassad.

De manière générale, il est difficile de s’exprimer librement en Thaïlande. Il est par exemple interdit de dire du mal du roi ou de la famille royale : les peines infligées pour crime de lèse-majesté sont souvent sévères, et les étrangers n’échappent évidemment pas à la règle. Dans ce contexte, difficile de parler d’une quelconque liberté de la presse. D’autant plus que depuis début 2015, un projet de loi assurant la main mise du gouvernement sur internet est en train d’être étudié. Celui-ci permettrait au pouvoir en place d’exiger la coopération immédiate des fournisseurs d’accès internet, sous couvert de sécurité nationale.
Ce genre de restrictions est peu surprenant en Asie, qui est particulièrement mal placée dans le classement de la liberté de la presse de Reporters sans frontières. Le Laos, le Vietnam, la Chine et évidemment la Corée du Nord, sont classés dans les pays respectant le moins la liberté de la presse. Et la Thaïlande est en 134ème position sur 180.

thailande

L’association avait d’ailleurs à l’origine créée la journée mondiale contre la cyber-censure, pour lutter contre les agissements du gouvernement chinois.

La situation pour les journalistes en Thaïlande n’est pas prête de s’arranger. Prayut semble visiblement bien installé sur son fauteuil de ministre. En accédant au pouvoir, il avait assuré qu’il ferait en sorte de mettre en place des élections démocratiques au plus vite. Pourtant, aucune élection n’est pour l’instant annoncée.

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Horizons Médiatiques

Le monde raconté par les étudiant·es du Master Nouvelles Pratiques Journalistiques de l'Université Lumière Lyon 2.